La Truffe du Steinhart : Diamant caché d'un territoire préservé
Au cœur de la Moselle, entre Forbach et Sarreguemines, s'étend le Steinhart, une région préservée où la nature sauvage côtoie le patrimoine culturel. Depuis la nuit des temps, le Steinhart a abrité ces pépites dans nos terres de Muschelkalk. Parmi ses trésors cachés, la truffe du Steinhart se distingue par sa rareté et son arôme délicat.
Les truffes ? Une histoire ancienne !
Dans l'antiquité
Les Egyptiens : -2600 av. JC Khéops…
Les Grecs : Pythagore, Théophnaste…
Les Romains: Pline, Juvénal, Plutarque...
Eclipse de la truffe
De la chute de l’empire romain (invasions barbares) jusqu'au moyen âge.
XIVe, XVe siècle
Réapparition de la “truffe de Bourgogne” à la table des Rois de France.
La Renaissance marque le début d'un nouvel âge d'or.
La “truffe noire” paraît à la table de François ler.
Période de croissance
XVIle, XVIIIe siècle : Louis XIV, Louis XV, Louvois, Carême....
Apothéose de la truffe
XXe siècle jusqu'en 1914 : Brillat Savarin, Rossini, Verdi, Flaubert, Dumas, Colette, Proust...
Un patrimoine historique et une diversité méconnue
Au XIXᵉ siècle, la production de truffes commercialisée dans le Grand-Est, essentiellement destinée à Paris, représentait plus de 80 tonnes par an.
Ce chiffre témoigne de l'importance historique de cette région dans l'économie truffière française.
Il existe de par le monde de nombreuses espèces de truffes qui se sont adaptées aux conditions spécifiques qu'elles ont trouvées, jusque dans le Sahara et d'autres régions improbables. Nous allons nous limiter aux trois variétés les plus courantes sous nos latitudes :
La truffe mésentérique (Tuber mesentericum), dite truffe de Meuse
La truffe uncinatum, dite de Bourgogne, de Lorraine, et récemment truffe du Steinhart
La truffe melanosporum, dite truffe du Périgord, qui remonte de plus en plus dans l'Est puisqu'elle est maintenant présente en Moselle
Nous ne parlerons pas de la truffe magnatum, blanche dite d'Alba, qui refuse obstinément de traverser la frontière italienne. Ces truffes se trouvent toutes à l'état sauvage dans les contrées illustrées ci-contre.
Source T54L
Source T54L
Par contre, il existe de plus en plus de trufficulteurs qui sont tombés amoureux de ce tubercule souterrain et qui ont décidé de le cultiver.
Pour cela, vous pouvez suivre des stages au lycée agricole de Crogny dans l'Aube, vous permettant de vous instruire à la culture et au cavage des truffes. Il existe ainsi une filière truffes gérée par l'Association des Trufficulteurs du Grand-Est, qui propose des formations complètes “de la racine à l'assiette” au Campus Terre de l'Aube.
Qu’est-ce que la truffe du Steinhart ?
La truffe du Steinhart, présente bien avant les années 1500, est une variété de truffe d'automne (Tuber uncinatum), également connue sous le nom de truffe de Bourgogne. Elle se caractérise par :
Péridium noir à écailles pyramidales, parfois proéminentes.
Gléba brun foncé à marbrures blanches, évoquant le chocolat au lait.
Arôme subtil de noisette et de champignon, moins prononcé que celui de la truffe noire du Périgord.
Taille variable, pouvant atteindre plusieurs centaines de grammes.
Saison de récolte principalement en novembre-décembre.
Cette truffe se développe en symbiose avec les racines de certains arbres tels que le chêne, le noisetier, le charme et le pin noir. Elle est sensible à la sécheresse prolongée et préfère les sols calcaires et bien drainés comme ceux de la région.
Une anecdote culturelle : la truffe a même inspiré des chansons locales, comme celle d’un voleur de truffes dans la complainte populaire lotharingienne “Oh du armer Lothringer Bur”, qui remonterait à la guerre des paysans (1524-1526).
Le rôle écologique des champignons
Les champignons, dont font partie les truffes, jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes.
Ils décomposent la matière organique morte, permettant ainsi de recycler les nutriments indispensables à la vie. De plus, ils forment des mycorhizes, des relations symbiotiques avec les plantes, qui améliorent l’absorption de l’eau et des nutriments par ces dernières (les champignons jouent un rôle indispensable pour les orchidées).
Ils constituent également une source de nourriture pour de nombreux animaux, intégrant ainsi ces organismes dans les chaînes alimentaires. Enfin, leur présence est un indicateur précieux de la santé de l’environnement, reflétant la biodiversité et l’équilibre des écosystèmes.
Histoire et fonctionnement de la truffe
La truffe est un champignon souterrain qui ne peut se développer qu'en présence d'un arbre mycorhizé. Cette relation symbiotique, appelée mycorhization, lie intimement les racines de l'arbre aux filaments du champignon (le mycélium). L'arbre fournit à la truffe des sucres issus de la photosynthèse, tandis que la truffe aide l'arbre à mieux absorber l'eau et les minéraux du sol. Cette association est indispensable : sans arbre hôte, pas de truffe possible.
On peut reconnaître la présence d'un mycorhize de truffes à l'aspect brûlé des herbes autour des arbres dont les racines sont en symbiose avec ce champignon souterrain. Cette zone dénudée, "brûlé", indique qu'il y a une intense activité souterraine de ramifications et donc la possibilité de pouvoir récolter des truffes si les conditions de température et d'hygrométrie sont appropriées.
Mais ça n'est surtout pas une science exacte et bien souvent un orage localisé, même nocturne et inaperçu, peut déclencher une intense activité du champignon à partir du mois de mai. Le résultat est souvent obtenu bien plus tard, de septembre à fin décembre pour notre truffe du Steinhart.
Et pour compliquer encore un peu plus l'affaire, nous pouvons même trouver ces truffes en été. On parle alors de la truffe d'été qui semble être une uncinatum précoce mais qui n'a pas la même saveur. Elle trouve par contre preneur chez les restaurateurs les plus malins, qui vous proposent soudain en plein été à la carte un plat de tagliatelles aux brisures de truffes pour 20€, ce qui vous surprendra d'autant plus que pour relever un peu l'odeur de la truffe, ils rajoutent discrètement de l'huile à la saveur truffes…
Comme vous n'êtes pas vraiment connaisseurs, vous vous régalez et remerciez le ciel de vous avoir permis cette belle expérience culinaire. Mais revenons sur terre.
Ce qui est le plus surprenant, c'est la transmission du parfum de notre truffe aux œufs frais. Vous mettez dans un tupperware une ou deux truffes fraîches cavées au matin et vous y ajoutez une demi-douzaine d'œufs fermiers. Vous fermez hermétiquement le tupp et vous laissez au frigo à 5 degrés. 24 heures plus tard, vos œufs auront absorbé l'odeur de la truffe au travers de la coquille et vous pourrez vous faire une brouillade d'anthologie. Cuisson des truffes brève et légère, mais elles sont très bonnes aussi crues.
La truffe du Steinhart en cuisine
La truffe du Steinhart est particulièrement appréciée en gastronomie pour sa saveur délicate et raffinée.
Elle peut être utilisée de différentes manières : râpée crue sur des pâtes, des risottos ou des salades, infusée dans des huiles ou des beurres pour aromatiser vos plats, ou encore incorporée dans des sauces ou des vinaigrettes.
Grâce à sa subtilité aromatique, elle constitue une alternative intéressante à la truffe noire du Périgord, permettant de sublimer vos préparations culinaires sans masquer les autres saveurs.
La truffe du Steinhart est une espèce protégée en France et sa cueillette est strictement réglementée. Il est donc interdit de la récolter sans autorisation. Pour contribuer à sa préservation, il est important de respecter les zones de récolte définies par les autorités compétentes. Vous pouvez également participer à des programmes de plantation d’arbres mycorhizés, afin de favoriser le développement de cette truffe d’exception. Enfin, il est essentiel de sensibiliser votre entourage à l’importance de cette espèce et de son habitat, afin de protéger durablement ce patrimoine naturel et gastronomique unique.
Récolte des truffes : trois méthodes
Pour récolter des truffes, trois formules s'offrent à vous.
Le cochon : efficace mais encombrant
Vous achetez un cochon et vous le dressez à caver la truffe. Le cochon a un meilleur odorat que le chien mais il a quelques inconvénients. Il est plus rapide à trouver et plus fiable en général que le chien, mais s'il prend place à côté de vous le soir sur votre canapé, il est possible que votre compagne/compagnon vous demande à terme de choisir entre elle et le cochon, ce qui peut engendrer un stress important.
L'autre inconvénient, c'est qu'il prend à terme une dimension et un poids importants, ce qui peut vous amener à être obligé de changer de canapé, de voiture et même parfois de femme/mari (humour de trufficulteur, bien sûr).
Alors nous vous recommandons le chien... sauf si vous êtes amateur de porc à la truffe, puisque là vous faites coup double, mais est-ce bien raisonnable !
Le chien : le compagnon idéal
Les meilleurs chiens sont évidemment les Lagotto Romagnolo, une race de caniche élevée depuis des lustres pour se spécialiser dans la recherche de truffes. Mais là encore une fois, le plus important sera pour vous de comprendre le langage du chien.
Tous les chiens sans exception sont capables de trouver des truffes. Leur capacité olfactive est un million de fois plus élevée que celle de l'homme. Ils sont capables de sentir une truffe mûre en terre à bien plus de 30 mètres.
Le problème, ce sont les hommes qui ne sont pas capables de comprendre le langage de leur chien et qui, par un manque de connaissance de la psychologie de son compagnon, passent à côté du sujet en ne le faisant pas travailler comme il faut.
Soyons honnêtes (et un peu taquins), il est plus facile de dresser un "mauvais chien" à la recherche de truffes qu'un "mauvais compagnon humain".
Le chien prend un réel plaisir à caver et souvent plus qu'il ne peut supporter, car ce travail ou ce jeu peut lui fait perdre plusieurs kilos en une journée. Il peut se déshydrater rapidement, mettant en danger sa santé. Ce sera à vous de lire ses attitudes et de les interpréter : un chien fonce et cherche pour faire plaisir à son compagnon et cela sans se ménager.
La mouche épicurienne : technique de précision
Enfin, la dernière technique consistant à trouver des truffes est la recherche de celles-ci au travers d'une petite mouche dite épicurienne (Suillia tuberiperda) ou mouche à truffe. Cette mouche pond ses œufs à proximité des truffes mûres et trahit ainsi leur présence en volant en petits cercles au-dessus du sol.
C'est une technique très efficace mais qui demande une grande concentration, une approche très calculée et une très bonne vue.
Source : inaturalist.org
Pourquoi la truffe du Steinhart est précieuse
Outre son goût raffiné, la truffe du Steinhart témoigne de la richesse naturelle de la région.
Elle contribue à la biodiversité locale et à l’économie gastronomique. Posséder un arbre truffier ou savoir repérer ces joyaux sous la forêt, c’est participer à la préservation d’un savoir-faire et d’un patrimoine culinaire.
La truffe du Steinhart est un joyau de la biodiversité mosellane. Sa préservation nécessite une connaissance approfondie et un respect strict des réglementations.
En tant que passionnés de nature, nous avons la responsabilité de protéger ce patrimoine unique.
Si vous souhaitez approfondir vos connaissances sur la truffe du Steinhart ou partager vos expériences de cueillette, n'hésitez pas à laisser un commentaire ci-dessous.
Le prix de notre truffe
Enfin, dernier volet : le prix.
On se contentera de donner les prix de notre truffe à nous. Il varie de 600 à 800 € le kilo au marché de Pulnoy près de Nancy, qui est le plus important marché de truffes uncinatum de France.
Aide à la plantation de truffière
La Région Grand Est soutient le développement des plantations truffières. L’Association des Trufficulteurs du Grand Est (ATGE) centralise, étudie et valide les projets de plantations et accompagne les porteurs de projet.
Qui peut bénéficier de l’aide ? Propriétaires fonciers avec un projet d’activité trufficole, exploitants agricoles à titre principal ou secondaire, sociétés à objet agricole, établissement d’enseignement et de recherche agricole, communes et propriétaires privés.
Vous devez être membre d’une association départementale de trufficulture et être à jour de cotisation. Enfin, vous devez avoir suivi une formation “Créer sa truffière” auprès des organismes de formation identifiés par l’ATGE (cités précedemment).
Rendez-vous au marché de la truffe du Steinhart
Début décembre nous avons organisé le premier marché de la truffe du Steinhart, avec ce franc succès, nous vous annonçons dès à présent que nous organiserons à nouveau un marché au truffes et aux champignons sauvages, dans un des 17 villages de notre terroir.
Ce sera l'occasion de découvrir ce trésor local, d'échanger avec des passionnés, de déguster des produits du terroir sublimés par notre truffe, élément fort de notre patrimoine naturel exceptionnel.
Restez connectés pour connaître la date et le lieu précis de cet événement.
Nous avons hâte de partager avec vous les saveurs authentiques de nos terres de Muschelkalk.
La cueillette de champignons est une activité agréable, mais elle comporte des risques si elle est faite sans connaissance.
Ne cueillez que les champignons que vous êtes absolument sûr(e) d’identifier.
En cas de doute, ne les ramassez pas ou faites-les vérifier en pharmacie avant toute consommation.
N’oubliez pas : certains champignons toxiques peuvent ressembler à s’y méprendre à des espèces comestibles.
L’association ne vous incite en aucun cas à consommer des champignons. Son seul objectif est de sensibiliser et informer.